Une approche zoopoétique du roman se fonde sur un renouvellement des interfaces disciplinaires, soit en reformulant les termes du dialogue depuis longtemps établi entre études littéraires et philosophie, éthique ou histoire, soit en instaurant des croisements inédits avec la zoologie , l’écologie, le droit, les études religieuses ou l’anthropologie. La compréhension de ce qui, ailleurs que dans son champ de recherche, fonctionne comme enjeu, comme verrou, comme point aveugle ou comme moteur conduit à décaler et donc à rénover une démarche qui a toujours tendance à devenir trop familière ; elle conduit aussi à mettre en relief l’apport spécifique des études de lettres à la question animale. En effet, ces déplacements et ces pas de côté hors de la sphère « purement » littéraire (si tant est qu’elle existe…) mènent au repérage d’innovations thématiques ou de motifs qui n’avaient pas été répertoriés par l’histoire littéraire. Ils permettent surtout d’interroger à nouveaux frais les rythmes et les phrasés, les effets de listes ou d’ellipses, les structurations narratives et syntaxiques, les alternances de points de vue, bref cet ensemble de manières d’écrire par lesquelles un auteur engage le lecteur dans le monde d’une bête singulière ; par lesquelles, souvent, aussi, cet auteur évoque comment ce monde lui échappe.